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Vous voulez savoir si la musculation trail et en course est meilleure en unilateral ou en bilateral ? Cet article est pour vous 😉

Couverture de l'article sur la musculation pour le trail et running unilatéral bilatéral

La musculation en trail et en course à pied

En trail et en course à pied, la musculation et le renforcement musculaire sont des piliers de la performance, et des progrès. À mon sens, quel que soit le niveau de l’athlète, inclure ce type d’entraînement dans la planification est important. Dans une semaine d’entraînement normal, il vaut même mieux, pour moi, remplacer une séance de course à pied ou de trail par de la musculation, que réaliser uniquement des entraînements en courant.

Cependant, “faire de la musculation” n’est pas si simple, tant les modalités de pratiques sont nombreuses. En effet, il est possible de manipuler le type de régime de contraction musculaire (p. ex. concentrique ou pliométrique) ; le type de force ciblé (p. ex. force maximale vs. endurance de force), ou encore le mode d’exercice (p. ex. unilatéral vs. bilatéral, dont nous allons parler ici). En tant que sportives ou sportifs, nous allons devoir faire des choix pour cibler les modalités de musculation les plus pertinentes afin de progresser en trail et/ou en course à pied.

 

Rappel – L’importance de la force maximale en trail et course à pied

Commençons par un rappel concernant un premier choix possible. Ici, je vous vulgarisais la méta-analyse de 2022 de Eihara et al., publiée dans un des journaux les plus prestigieux en sciences du sport. À travers 22 études, cette méta-analyse évaluait qui des exercices pliométriques ou des exercices ciblant la force maximale, était le plus efficaces pour progresser en économie de course, et en vitesse de course.

Leurs résultats ont montré que la musculation avec des charges lourdes semblait plus efficace que celle en pliométrie. Le travail de la force maximale devrait, d’après ces auteurs, durer 10 semaines minimum, avec 2 à 3 séances par semaine. Chaque séance devrait être constituée de 4 exercices, ciblant les muscles des cuisses (antérieurs et postérieurs) et ceux des mollets. Pour chaque exercice, il faudrait réaliser 4 séries de 3 à 4 répétitions à 80-90% du maximum soulevable une fois, ou à RM4.

Dans notre collaboration, Olivier Bolliet recommandait de réaliser des séries de 4 répétitions avec entre 0 et 2 répétitions en réserve (plus d’info ici). Les séances devraient être réalisées sur des jours sans entraînement en course à pied, et espacées de 48h minimum. Les répétitions devraient être séparées de 2 à 3 minutes de récupération passive.

Ce type de travail demande cependant de la technique, et de la progressivité. Je vous invite donc à être prudent si vous le faites seul, ou à vous faire accompagner dans l’implémentation de ce type d’exercice. Intéressons-nous maintenant à un autre choix possible en musculation, s’entraîner en unilatéral ou en bilatéral.

 

Musculation en trail et en course à pied – Unilatéral vs. bilatéral

Une croyance générale est que les exercices de musculation unilatéraux (c.-à-d. exercice un seul membre à la fois, comme le bulgarian split squat) sont meilleurs que ceux bilatéraux (c.-à-d. exercice les deux membres simultanément, comme le squat). Le travail unilatéral est souvent considéré comme plus transférable lors du geste sportif réel, ou encore plus sollicitant pour les stabilisateurs, donc plus complet.

Exemple d'un exercice de musculation unilatéral - Le bulgarian split squat Exemple d'un exercice de musculation bilatéral - Le squat

Exemple d’un exercice de musculation unilatéral – Le bulgarian split squat

Exemple d’un exercice de musculation bilatéral – Le squat

Mais qu’en est-il vraiment ? La littérature scientifique confirme-t-elle cette croyance ? C’est ce que nous allons voir ! Comme souvent, nous allons essayer de répondre à ces questions avec les meilleures évidences scientifiques, c’est-à-dire majoritairement des méta-analyses.

 

Unilatéral ou bilatéral ? 3 méta-analyses

“Aucune différence”,  la méta-analyse de Moran et al. (2021)

Selon Moran et al. (2021), en musculation il est possible de rendre l’entraînement le plus spécifique possible en jouant sur la vitesse de contraction musculaire, la direction du mouvement, mais aussi la latéralité. En effet, en course à pied et en trail, l’effort demande une alternance de contractions musculaires sur un seul appui (c.-à-d. unilatéral). Aussi, les exercices de musculation unilatéraux pourraient être, théoriquement, préférables.

Pour évaluer la véracité de cette croyance, ces auteurs ont regroupé 11 études. Elles comparaient toutes, chez des coureuses et des coureurs, les progrès après un programme de musculation avec des exercices unilatéraux ou bilatéraux. La principale limite de cette méta-analyse, est que les études considérées n’utilisaient que des efforts à pieds explosifs et rapides (p. ex. sprint, montés d’escaliers) comme marqueur de la performance en course. L’analyse de la qualité des études a révélé qu’elles étaient de bonne qualité, et à faible risque de biais.

Les analyses ont révélé une légère différence numérique en faveur de l’entraînement unilatéral. Cependant, cette différence n’était pas statistiquement significative, suggérant, vulgairement, qu’elle est due au hasard. En somme, que les exercices de musculation aient été réalisés en unilatéral, ou en bilatéral, les améliorations des performances en course à pied étaient équivalentes. Ces auteurs concluent en soulignant donc que le choix entre ces deux modalités influencera peu les progrès des athlètes. 

 

“Des progrès équivalents”,  la méta-analyse de Liao et al. (2022)

En 2022, Liao et ses collaborateurs ont réalisé une méta-analyse similaire à celle de Moran et al. (2021). Ils ont eux identifié 14 études pouvant être considérées dans leurs analyses. Dans ces dernières, les participants étaient des coureurs à pieds, mais aussi des footballeurs, des basketteurs, ou encore des rugbymen. Les auteurs ont évalué si un programme d’entraînements avec des exercices unilatéraux était plus efficace qu’un constitué d’exercices bilatéraux pour progresser. Les marqueurs de progrès étaient mesurés à travers des performances physiques comme des sauts, des changements de direction, de la vitesse, ou encore de la production de force.

De manière générale, leurs résultats ont montré exactement les mêmes tendances que l’étude de Moran et al. en 2021. Malgré une petite différence numérique entre les deux approches de la musculation (encore plus petite que celle précédemment identifiée), aucune différence statistique n’était identifiée. Là aussi, ce résultat laisse entendre que les exercices unilatéraux ou bilatéraux auront la même influence sur les progrès des sportifs.

 

Une supériorité de l’unilatéral ? Zhang et al. (2023)

La dernière méta-analyse dont je souhaite vous parler est celle de Zhang et al. publiée en 2023. Je ne vais pas rentrer dans les détails de celle-ci pour trois raisons. D’une part, elle est en grande partie similaire aux 2 autres précédemment citées. Deuxièmement, les marqueurs de performance qu’elle a considérés sont plus éloignés de la course à pied que dans les méta-analyses de Liao et al. (2022) et Moran et al. (2021). Enfin, elle est publiée dans un journal de moindre qualité.

Néanmoins, ses résultats vont majoritairement dans le même sens que les 2 études précédemment mentionnées. En agrégeant 28 études, ces auteurs ont montré que les exercices unilatéraux engendraient significativement plus de progrès que ceux bilatéraux, sur des marqueurs de la performance comme la hauteur de saut, la vitesse de sprint, la force maximale ou encore l’équilibre. Cependant, lorsqu’on s’intéresse à l’ampleur de cette différence (c.-à-d. vulgairement est-ce que les exercices unilatéraux sont un peu supérieurs, modérément supérieurs, ou fortement supérieurs à ceux bilatéraux ?), on remarque qu’elle est minime, comme dans les deux méta-analyses précédentes.

En d’autres termes, les exercices de musculation unilatéraux ne semblent pas plus efficaces pour progresser que ceux bilatéraux. S’ils le sont, l’écart entre les deux approches semble infime.

 

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Comment choisir entre exercice unilatéral et bilatéral ?

La littérature semble souligner que les exercices de musculation unilatéraux génèrent autant de bénéfices que ceux bilatéraux sur des marqueurs associés à la performance en course à pied. Nous pouvons donc nous demander s’il faut parfois préférer une de ces deux modalités de latéralité plutôt que l’autre.

Quand faire du bilatéral en musculation ?

Dans leur méta-analyse, Moran et al. (2021) apportent une première réponse à cette question. Ils avancent qu’il faudrait privilégier les exercices bilatéraux lorsque l’on souhaite mobiliser des charges élevées. Appleby et al. (2018) confirment cette observation. Ces auteurs soulignent que le transfert de la force vers l’amélioration de la performance est parfaitement atteignable avec des exercices bilatéraux. De plus, selon cette équipe, “un des avantages des exercices bilatéraux est le poids élevé mobilisable, permettant par exemple le développement de la force maximale”.

Aussi, mon sentiment est que cette modalité de travail est intéressante lors d’un cycle de travail avec des charges lourdes. Par exemple, si vous prévoyiez de développer pendant plusieurs semaines la force maximale de votre athlète (ou de vous-même), il me semble pertinent de préférer les exercices bilatéraux. Ces derniers pourraient maximiser le poids mobilisé, tout en limitant les risques de blessures grâce à la plus grande stabilité qu’ils proposent.

Quand faire de l’unilatéral en musculation ?

Appleby et al. (2018) avancent que si le travail unilatéral force à diminuer les charges, il “nécessite une coordination neuromusculaire (p. ex. stabilité et co-contraction articulaire)” parfois intéressante à travailler. Cela serait surtout vrai en cas de déficit identifié. Selon ces auteurs, ces exercices unilatéraux ont pour avantage de développer la coordination et les stabilisateurs musculaires qui peuvent ne pas être suffisamment stimulés dans les mouvements bilatéraux, stables.

De plus, le travail unilatéral peut être, à mon sens, utile en cas de déséquilibre musculaire important, et/ou de retour de blessure. En effet, dans ces cas, un membre risque d’être considérablement plus fort que l’autre et alors rendre l’exercice bilatéral sous-optimal. Le travail bilatéral peut permettre de solliciter fortement chacun des membres, tout en prenant en compte cette disparité.

Aussi, mon conseil en tant qu’entraîneur est d’utiliser les exercices unilatéraux lorsqu’un athlète démontre par exemple une stabilité peu prononcée, un déséquilibre de force important entre les deux membres, ou alors revient à l’entraînement après blessure. Cette modalité peut également lorsque le travail musculaire prévu ne nécessite pas l’utilisation de charges lourdes (p. ex. travail pliométrique, travail de l’endurance de force).

 

Conclusion – Musculation en trail et course à pied : unilatéral ou bilatéral ?

En conclusion, une modalité de travail manipulable en musculation est la latéralité des exercices. Ils peuvent être unilatéraux (c.-à-d. un seul membre à la fois) ou bilatéraux (c.-à-d. deux membres à la fois). Une croyance est que les exercices unilatéraux sont plus efficaces que ceux bilatéraux, car plus transférables.

Ma revue de littérature n’a identifié aucune étude menée spécifiquement dans le cadre du trail, ou de “longue” distance à plat (p. ex. marathon). Cependant, des méta-analyses sur des athlètes utilisant la course (p. ex. sprinter, footballeurs) existent. Les 3 que j’ai citées tendent toutes dans la même direction. Ensemble, elles montrent que les exercices de musculation unilatéraux ne génèrent pas plus de bénéfices que ceux bilatéraux. Ces deux modalités engendreraient les mêmes progrès. Une seule méta-analyse a trouvé une différence statistiquement significative entre ces deux approches. Cependant, cette différence était minime, voire négligeable.

Puisque ces deux latéralités semblent aussi efficaces pour progresser, nous pouvons nous demander quand privilégier l’une, ou l’autre. Des auteurs, comme Appleby et al. (2018) ou Moran et al. (2021) proposent des pistes de réflexion. Selon eux, les exercices bilatéraux sont à préférer lorsque les charges mobilisées doivent être lourdes. Ils permettraient dans ce cas-là d’aller chercher des tonnages plus importants, tout en diminuant le risque de blessures, grâce à la stabilité de ses exercices.

Pour les exercices unilatéraux, ils pourraient être privilégiés en cas de déséquilibre de force entre les deux membres. Ils seraient aussi préférables si l’athlète revient de blessure, s’il ou elle a des lacunes en contrôle postural / stabilité, ou quand le travail musculaire prévu n’oblige pas l’utilisation de charges lourdes. Comme toujours, si vous souhaitez mettre en plus ce type de travail en toute sécurité, je vous invite à vous faire accompagner par un coach.

 

Vidéos associés à cet article

Vidéo 1 – Mes explications en vidéo

 

Vidéo 2 – Mon interview d’un expert, Jean-Benoit Morin

 

Références bibliographiques

• Appleby, B. B., Cormack, S. J., & Newton, R. U. (2019). Specificity and transfer of lower-body strength: influence of bilateral or unilateral lower-body resistance training. The Journal of Strength & Conditioning Research33(2), 318-326. (Lien)
• Eihara, Y., Takao, K., Sugiyama, T., Maeo, S., Terada, M., Kanehisa, H., & Isaka, T. (2022). Heavy resistance training versus plyometric training for improving running economy and running time trial performance: a systematic review and meta-analysis. Sports Medicine-Open8(1), 138. (Lien)
• Liao, K. F., Nassis, G., Bishop, C., Yang, W., Bian, C., & Li, Y. M. (2021). Effects of unilateral vs. bilateral resistance training interventions on measures of strength, jump, linear and change of direction speed: a systematic review and meta-analysis. Biology of Sport39(3), 485-497. (Lien)
• Moran, J., Ramirez-Campillo, R., Liew, B., Chaabene, H., Behm, D. G., García-Hermoso, A., … & Granacher, U. (2021). Effects of bilateral and unilateral resistance training on horizontally orientated movement performance: A systematic review and meta-analysis. Sports Medicine51, 225-242. (Lien)

 

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