Peut-on croire la science pour courir mieux ?Temps de lecture estimé : 13 minutes

“En entraînement, la science est un premier garde-fou contre le n’importe quoi.”

 

ATTENTION : Cet article est long. Aussi, je l’ai divisé en 6 parties, et chacune de ces parties est à nouveau fragmentée en 2 sections. La 1ère « En détail. » présente pour chaque partie mon opinion de manière approfondie ; la 2ème « En bref. » présente un résumé des arguments développés. Vous pouvez comme ça choisir votre rythme de lecture, et aller droit à l’essentiel, ou prendre le temps de comprendre précisément ma position 😁

 

De quoi parle-t-on ?

Sur ce blog, je cherche des réponses avec des arguments scientifiques, et des études 📄 publiées dans des revues spécialisées. On pourrait croire que j’adopte cette démarche à cause de ma formation universitaire (doctorat en STAPS), et donc que je suis biaisé. Je voulais donc rédiger cet article pour vous présenter ma position, et pour défendre pourquoi je pense qu’on peut croire la science pour courir mieux. Dans les parties qui suivent, je présente les avantages à cette approche de l’entraînement basée par la science, et avance quelques limites à ma position. À la fin de cet article, vous n’aurez pas de réponse tranchée, mais des arguments pour ✅ et contre ❌, afin de vous faire votre propre avis 🤗.

 

Les théories, ce premier filet de sécurité.

En détail.

À mon sens, la première raison de faire confiance à la science pour courir mieux est l’importance des théories dans le milieu scientifique. Je ne pense pas trop m’avancer en disant qu’aucun chercheur ou chercheuse n’investira du temps, de l’argent et des ressources humaines (car conduire une étude est chronophage, coûteux, et demande beaucoup de personnes, tant pour la mener que pour y participer) pour tester une hypothèse (par exemple une nouvelle méthode d’entraînement) qui n’a pas de fondements robustes et crédibles. Par « fondements robustes », je sous-entends l’existence d’une théorie, ou d’un paradigme, nourri par plusieurs chercheurs et chercheuses, et ayant un rationnel d’après les connaissances actuelles.

Par exemple, l’hypothèse qu’un programme d’entraînement fractionné augmente nos performances en course à pied pourrait venir des connaissances que les scientifiques possèdent sur le rôle de la VMA (c.-à-d., vitesse maximale aérobie) dans la performance, et de la théorie selon laquelle travailler juste au-dessus de la VMA améliore celle-ci. Si demain je souhaite convaincre un collègue chercheur que tenir longtemps en équilibre sur les mains améliore la VMA, je devrais lui apporter des études menées sur le sujet ou un rationnel physiologique fort, pour le convaincre d’investir des mois de travail dans une étude sur le sujet 😅.

En bref.

À mon sens, la grande majorité des études scientifiques s’appuient sur des théories, acceptées par les pairs, validées entre experts et expertes, et considérées comme crédibles d’après les connaissances accumulées. C’est une première raison de faire confiance aux travaux scientifiques pour sélectionner des méthodes d’entraînements permettant de courir mieux, car cela augmente la confiance que nous pouvons avoir dans le rationnel des hypothèses, c’est-à-dire dans le rationnel qui soutient les bénéfices potentiels d’une méthode d’entraînement, plutôt qu’une autre.

Quand la méthodologie se met sur son 31.

En détail.

Une deuxième raison d’accorder de la confiance à la littérature scientifique pour courir mieux est la rigueur méthodologique des études. Lorsqu’une question est posée, et qu’une hypothèse est formulée, les chercheurs et chercheuses voulant y répondre vont utiliser différentes techniques et outils pour développer une méthodologie permettant de mettre en lumière, ou de rejeter le phénomène attendu. Ce cadre méthodologique est généralement discuté entre collègues, et découle lui aussi d’autres études scientifiques, elles aussi discutées et affinées par d’autres experts et expertes. Au final, il en ressort la plupart du temps une méthodologie avec le meilleur équilibre possible entre faisabilité du projet, et précision.

Par exemple, si je m’intéresse toujours à mon programme d’entraînement fractionné pour augmenter mes performances en course à pied, et que je proposer à un collègue chercheur une méthodologie avec un échantillon de 5 personnes dont on mesure la VMA après 3 entraînements, il est probable qu’il me dise que mon échantillon est trop petit, mon protocole trop court, et mes mesures imprécises. Autrement dit, ce dernier va remettre en question ma méthodologie, et nous allons essayer d’en développer une meilleure, éventuellement avec des collaborateurs et collaboratrices encore plus spécialistes que nous, pour répondre correctement à notre interrogation. J’en profite pour placer une recommandation qui n’engage que moi : faites toujours attention à la qualité des méthodes utilisées derrière des conclusions « scientifiques », car une méthodologie de mauvaise qualité rend caduque toute conclusion. J’ai par exemple déjà lu un « rapport d’étude » (non-publié dans la littérature scientifique) sur un programme « améliorant les performances en ultra-endurance ». Ce dernier était conduit sur 1 personne pendant 18 mois, sans groupe contrôle, et la conclusion était « la VO2max a augmenté, le programme fonctionne mieux que les autres programmes, achetez-le ». N’importe quel entraînement de 18 mois n’aurait-il pas eu cet effet ?

En bref.

La méthodologie parfaite n’existe pas. Cependant, faire avec le meilleur rapport faisabilité / précision ; suivre un cadre méthodologique strict et déjà éprouvé ; ainsi que profiter de l’expérience de collègues experts ou expertes du champ pour affiner ce cadre, sont de très bonnes bases, et sont celles de la méthode scientifique. En tant que coureur et coureuse, se fier à la rigueur de cette méthodologie scientifique, que les chercheurs et chercheuses réalisant correctement leur travail (autant méthodologiquement qu’éthiquement) adoptent, permet d’éviter de suivre un programme d’entraînement « testés » dans des conditions invalides, qui, dans le meilleur des cas, manquera d’efficacité, et dans le pire des cas, favorisera une blessure, du surentraînement, ou une contre-performance.

Les statistiques, où comment savoir si manger une paella améliore notre VMA.

En détail.

Les statistiques n’ont pas été mises au point pour embêter les chercheurs et chercheuses, ou les lecteurs et lectrices, ni pour rajouter des difficultés injustifiées. Si vous demandez à des personnes de courir un 10km, puis de manger une paëlla (végétarienne), puis de courir à nouveau le même 10km, je ne trouverais jamais exactement les mêmes temps entre la 1ère et la 2ème fois. Les personnes auront peut-être mis un peu plus du temps, ou un peu moins, mais ces différences ne représentent sûrement pas un phénomène réel, juste du hasard, du bruit dans les données. Dans cette situation, les statistiques enfilent leur plus beau collant et accourent pour essayer d’informer le ou la scientifique sur la situation dans laquelle il ou elle se trouve. Elles tenteront alors de fournir des indicateurs pour répondre à la question « est-ce que manger une paëlla est effectivement la meilleure méthode d’entraînement pour la course à pied, ou est-ce qu’il vaut mieux éviter d’y croire ? ».

Plus précisément, dans une étude les analyses des données par des modèles statistiques ont deux utilités majeures. La première est de tenter de discerner si le hasard a probablement amené aux données récoltées, ou si les données ont révélé un « vrai » phénomène à découvrir (p. ex. est-ce que les différences de performances que j’observe entre avant et après un cycle d’entraînement par fractionné sont observées par chance, ou parce que l’entraînement développé fonctionne ?).

Deuxièmement, les analyses statistiques permettent de quantifier l’ampleur d’un phénomène (p. ex. est-ce que mon cycle d’entraînement par fractionné est un peu efficace ou très efficace pour améliorer la performance ?). Si demain je découvre une nouvelle méthode d’entraînement qui vous fait progresser en course à pied grâce à un programme vous demandant beaucoup de temps au quotidien, et des séances très désagréables, pour au final gagner 5 secondes sur un ultra de 24h, il est probable que vous me répondiez qu’il ne vous intéresse pas, car les bénéfices sont trop minimes.

On entend régulièrement la phrase « les statistiques, on leur fait dire ce qu’on veut ». Pour moi cette maxime n’est vraie que si la personne à l’origine des analyses fraude, triche, manipule les données. Les statistiques réalisées correctement, autant méthodologiquement qu’éthiquement, fournissent des informations cruciales sur la probabilité qu’une méthode d’entraînement soit efficace, et sur l’ampleur pratique de cette efficacité, c’est à dire dans quelle mesure elle nous aidera à progresser. Si ces analyses sont réalisées proprement, avec la rigueur et l’éthique scientifiques qui incombent aux chercheurs, elles sont un allié en or qui aide à croire en une nouvelle méthode d’entraînement pour courir mieux, ou à mettre cette méthode de côté au profit d’une autre.

En bref.

Les conclusions des études scientifiques publiées découlant souvent d’analyses statistiques. Ces analyses ont deux utilités. La première est de fournir des indices numériques permettant de faire la part entre le hasard et un phénomène réel (p. ex. une amélioration de notre temps de course aléatoire, ou à cause d’un programme efficace). La deuxième est de quantifier l’ampleur des bénéfices d’une méthode d’entraînement (p. ex. après un programme, vais-je courir 1% plus vite ou 10% plus vite ?). À mon sens, pour moi, ces deux utilités sont deux bonnes raisons de se baser sur la science, et les statistiques, pour faire des choix rationnels scientifiquement dans la construction d’un programme d’entraînement, et donc courir mieux.

Allers-retours sur l’autoroute de la révision.

En détail.

Avant d’être publié et accessible, un article scientifique doit obligatoirement passer par un processus appelé la « révision par les pairs ». Ce processus est la plus importante différence entre un article scientifique, et un billet sur un blog ou un site internet (comme celui que vous êtes en train de lire), qui n’est relu par personne et ne passe donc pas par un processus de vérification et de confrontation de son contenu à des experts du champ. Ce processus de révision permet, dans une certaine mesure, d’écarter les études de très mauvaises qualités ; et de corriger les erreurs qui auraient pu être réalisées par les chercheurs à l’origine de l’étude. Ce processus spécifique à la recherche est un garde-fou essentiel à mes yeux. Malheureusement, ce filtre (nécessaire) est évidemment imparfait. Par exemple, il est réalisé par des humains, qui peuvent eux aussi réaliser des erreurs. De plus, des revues « scientifiques » malveillantes se sont développées ces dernières années, avec pour objectif de publier n’importe quel article « scientifique » du moment que les auteurs payent une somme donnée (ce qu’on appelle les revues prédatrices, ou éditeurs prédateurs, dont les articles doivent à mon sens être directement mis à la poubelle). Ces dernières rajoutent du bruit dans la littérature, et des études de mauvaise qualité. Heureusement, ce type de revue se fait identifier de plus en plus facilement et fréquemment (par exemple, la Beall’s list tente de les référencer), et « attraper », comme à travers cette fausse étude publiée sur la relation entre la prise de chloroquine et le nombre d’accidents en trottinette électrique à Marseille, qui a été diffusé dans la presse « tout public » (article ici). Cependant, si on sait (a) faire le tri dans l’information ; (b) exclure ce type de revue, et (c) lire minutieusement un article ; alors on se rend compte que la littérature scientifique regorge de travaux de qualités, réalisés par des chercheurs sérieux qui ont pour but de répondre le plus rigoureusement possible à une question. Bien sûr, ces 3 compétences sont longues à développer, demandent du temps et du travail*, et la malhonnêteté de certains chercheurs, combinée à celle de certains journaux, complexifie parfois la tâche. Heureusement je me propose de faire ce travail pour vous dans la sélection des articles que je présente sur ce blog, et j’essaierai au maximum de sélectionner uniquement des articles de qualités, avec le moins de biais possible, en espérant ne pas me tromper.

*Je dispense des formations permettant d’acquérir ces compétences. Si vous souhaitez les développer, contactez-moi 😉

En bref.

En recherche, la révision par les pairs permet, avant publication d’un article, de confronter le contenu de l’article à des experts, pour détecter d’éventuelles erreurs, incohérences, et le corriger. En cherchant des informations sur internet, par exemple sur comment s’entraîner en course à pied ou en trail, nous pouvons nous retrouver confronter à 3 types de documents :

  • ❌ Le document ne cite pas de source scientifique. Alors, ce qui est écrit doit être considéré comme « sorti du chapeau », sans fondement, comme une opinion uniquement personnelle et invérifiée (voire même parfois invérifiable) ; et n’est pas passé par un échange avec des experts du domaine, dans le but de corriger de potentielles erreurs (volontaire ou involontaires), et de challenger les propos présentés.
  • 🤷🏻‍♂️ Le document cite des sources scientifiques pour soutenir ses propres propos. Nous pouvons alors avoir plus confiance dans son contenu, car il s’appuie sur des résultats ayant été corrigés par des experts. Cependant l’adéquation entre les propos avancés et la source censée les soutenir n’a, elle, jamais été révisée (il arrive même que la source ne parle pas du tout du propos, dans les cas les plus malhonnêtes).
  • ✅ Le document vulgarise / retranscrit un article scientifique sans y ajouter ses propres conclusions, sans utiliser ses informations pour formuler de nouvelles interprétations. À mon sens, ce type de document est le plus crédible, car il ne fait que rapporter le contenu d’un article scientifique sans y ajouter sa propre déformation. Aussi, les propos avancés sont normalement les mêmes que ceux qui ont déjà été relus et révisés par des experts du domaine.

Sur ce blog, nous serons la plupart du temps dans le 3ème cas, où je chercherai à répondre à une question en vulgarisant un ou plusieurs articles scientifiques, sans y ajouter, ou en y ajoutant le moins possible, ma réinterprétation personnelle. Si tel doit être le cas, les références seront évidemment citées.

 

Les grands noms se moquent de la science.

En détail.

Dans ce type de discussion où je présente les avantages d’une approche scientifique, par exemple pour faire des choix dans l’entraînement que nous allons suivre, des remarques qui reviennent régulièrement mettent en avant le fait que certains entraîneurs, ou entraîneuses, et certains grands champions, ou grandes championnes, ne suivent pas d’entraînements basés sur la science. Ces remarques sont en partie fausses, mais aussi en partie vraies. Des coachs ne s’appuient pas du tout sur la littérature scientifique, et n’ont même aucune connaissance ou compétence scientifique (je vous renvoie d’ailleurs à mon article « Comment choisir un coach pour courir mieux ? »). Ce n’est ni un reproche, ni une critique, simplement un constat. Ces entraîneurs, et entraîneuses, peuvent néanmoins amener des coureurs et coureuses vers le haut niveau, et les aider à devenir des champions et championnes, ou aider à progresser des coureurs et coureuses de moins haut niveau. Autrement dit, ils peuvent tout de même obtenir des résultats positifs, dont nous entendrons certainement parler, sans approche scientifique. Cependant ils peuvent aussi obtenir des résultats moins positifs, dont on entendra certainement moins parler, ou qui seront moins mis en avant. À mes yeux, il faut garder en tête 4 points importants.

  • Un grand champion n’a pas les mêmes prédisposions physiologiques que la grande majorité des coureurs et coureuses que nous sommes probablement (si je veux utiliser des termes scientifiques, ils et elles ne sont pas représentatifs de la population, c’est-à-dire de la grande majorité d’entre nous). La littérature est claire, parmi les déterminants de la performance de très haut niveau on retrouve malheureusement des prédispositions biologiques et physiologiques à celle-ci. Nous pouvons tous progresser énormément, mais le très haut niveau sportif est malheureusement très difficilement accessible si nous ne possédons pas les « bonnes » prédispositions physiologiques. La plupart d’entre nous se situent dans la tranche des athlètes avec des performances plus ou moins hautes (mais toujours géniales par rapport à nous même, ne l’oublions pas) mais nous ne sommes probablement pas dans le top 10 de la course de quartier de Chamonix (si tel est le cas, je suis flatté que vous lisiez mon blog !). Les différences physiologiques entre nous et les coureurs et coureuses à l’avant des courses sont certainement majeures. Par exemple, peu d’entre nous ont gravi un 4000m à 6 ans comme Kilian Jornet, ou ont passé leur adolescence dans un club de ski de fond de haut niveau à titiller Martin Fourcade, comme Xavier Thévenard. Aussi, je pense qu’il faut accepter que les grands champions et grandes championnes sont dans une certaine mesure différents et différentes de nous, et que leur performance ne sont pas uniquement dues à un entraînement scientifiquement validé, ou non. Cela ne veut pas dire que leur entraînement est inutile, loin de là, ni même qu’ils et elles ont moins de mérite, car sans les entraînements très difficiles qu’ils et elles réalisent cette sorte de « base » ne servirait à rien. Ce que je veux simplement dire ce que les entraînements qu’ils et elles reçoivent catalysent un potentiel déjà hors-norme, et que donc leur résultat ne sont pas que le fruit d’un choix d’entraînement basé sur la science ou non.
  • Les entraînements des champions et championnes sont très individualisés, et sont le résultat de longues collaborations. Les athlètes et leur(s) coach(s) passent des mois, voire des années, à tester différentes méthodes, différents ajustements, à développer leurs connaissances mutuelles, ainsi que leurs relations, jusqu’à trouver ce qui fonctionne le mieux. De nombreuses évaluations et collectes de données sont réalisées tout au long de ce processus afin d’affiner au maximum la préparation. Personnellement, je crois qu’un coach avec qui nous pourrions travailler n’aura probablement pas le temps de rentrer aussi finement dans les détails avec une personne spécifiquement, simplement car il ou elle entraînera plusieurs athlètes et manquera de temps, les journées ne faisant que 24h. Aussi, un avantage de suivre un entraînement basé sur la science (que nous construisions nous même cet entraînement, ou que notre coach choisisse cet entraînement avec une approche scientifique), est que ce programme a été éprouvé sur un échantillon de personnes, et qu’il semble fonctionner pour une certaine majorité de personnes. Évidemment, il faut saisir la moindre opportunité d’individualiser un programme validé, mais partir d’évidences scientifiques valides est à mon sens un point de départ essentiel.
  • Rien ne nous dit que si ce même grand champion, ou cette même grande championne, changeait son entraînement, il ou elle ne serait pas encore plus performant(e). Une performance à haut niveau d’un ou d’une athlète est le fruit de nombreux facteurs, et de nombreuses prises de décisions, et même pour les entraîneurs / entraîneuses il est très difficile, voire impossible, de savoir lequel de tous ces ingrédients a été le plus efficace. Aussi, il est difficile de savoir si le programme choisi a été le plus efficace, ou si un autre programme aurait engendré des résultats encore plus impressionnants.
  • Les plus grands aussi se tournent de plus en plus vers la science ! Je conclurai sur ce point, car je trouve que c’est un virage intéressant. De plus en plus de marques avec une team (ps : arrêtons de dire « un team » svp … team = équipe = féminin, une team semble plus approprié) développent un département scientifique, ou font appel à des « scientifiques du sport » (« sports scientists » en anglais). Salomon®, Hoka®, On®, sont des exemples. Similairement, pour son record sur Sierre-Zinal en 2019, Kilian Jornet a fait appel au coach Jean-Louis Bal, qui a une approche ancrée dans la littérature scientifique et les thèses sur le sujet (pour plus d’info, je vous renvoie à l’épisode qui lui est dédié dans le « Let’s trail podcast », en lien ici). Bref, même les grands commencent à y voir des bénéfices, alors, pourquoi pas nous ?

En bref.

Il est vrai que les coachs des grands champions et championnes ne se basent pas toujours sur les nouveautés scientifiques. Cependant, les différences entre les coureurs et coureuses de peloton, et les champions et championnes sont grandes et je pense que nous ne pouvons pas nous calquer sur eux. De plus, les résultats de ces derniers et dernières sont le résultat du croisement de plein de déterminants, et il est difficile de conclure que juste un choix d’entraînement inconnu scientifiquement est LE déterminant clé de leur réussite. Enfin, rien ne nous assure qu’une autre méthode d’entraînement (par exemple scientifiquement validée) n’amènerait pas ces champions et championnes encore plus loin (p. ex. est-ce que Mathieu Blanchard aurait pu battre Kilian Jornet à l’UTMB 2022® si son entraînement avait été plus basé sur la littérature ? J’aime cet exemple, car Kilian a une approche scientifique de sa préparation, avec beaucoup d’analyses de ses propres données, de ses évolutions. Il est impossible de savoir si cette différence explique les résultats, mais imaginez … ), et derrière certains grands records (p. ex. Kilian Jornet sur Sierre-Zinal) se cache une démarche scientifique. Alors, pourquoi cette même démarche ne fonctionnerait pas sur nous ?

 

Conclusion

Vous l’aurez compris, selon moi nous pouvons faire confiance à la science pour courir mieux. J’irais même plus loin, il faut faire confiance à la science pour calibrer ses entraînements. La recherche scientifique n’est pas parfaite, et il y a plein de questions auxquelles elle n’a pas encore répondu, ou elle ne répondra jamais. Cependant, pour moi en entraînement, la science est un premier garde-fou contre le n’importe quoi. Quand une équipe de recherche se questionne sur une méthode scientifique, cette dernière découle très certainement des connaissances que la science possède déjà sur la probable efficacité de cette méthode, autrement dit, cette technique a un rationnel fort. Ensuite, à travers une belle méthodologie et des analyses statistiques rigoureuses, cette équipe va tenter d’évaluer si cette méthode a effectivement des effets bénéfiques, ou pas, et à quel point ces éventuels bénéfices sont grands. Enfin, bien que plusieurs entraîneurs et entraîneuses, de champions / championnes, ou de coureurs / coureuses plus « classiques », n’adoptent pas cette approche scientifique, c’est pour moi une grosse lacune, qui a plus de chance d’être limitée, voire dommageable, plutôt que bénéfique à notre évolution. Aussi je sais que d’un point de vue très personnel et dans le but de courir mieux, je construirai toujours mes programmes d’entraînements en m’appuyant sur des articles scientifiques, et je ne choisirais pas un ou une coach qui n’a pas cette même approche de l’entraînement.

 

Cyril Forestier

Trailer passionné 🏃🏻‍♂️ et docteur en science du mouvement humain (STAPS) 👨‍🔬 , je décrypte la littérature scientifique pour mieux comprendre notre pratique. Je rédige des articles afin de vulgariser des études, de vous partager mes tests matériels ou encore de vous communiquer ce qui me motive, tout ça dans le but de courir mieux ! Des réponses à vos questions se trouvent surement dans mes articles 😉.

 cyrilinthemountains@gmail.com

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