Vêtements compressifs et récupérationTemps de lecture estimé : 9 minutes

Vous vous demandez si les vêtements compressifs améliorent la récupération ? La compression permet-elle de mieux récupérer ?  Cet article est fait pour vous ! 😉

Illustration pour l'article sur les vêtements compressifs et la récupération

Les vêtements compressifs en récupération

Dans l’article précédent sur le site (celui-ci) je vous ai présenté 4 études de haute qualité. Ces dernières s’intéressaient aux effets des vêtements compressifs sur les performances en endurance. Ils concluaient que, de manière générale, il ne faut pas attendre un quelconque effet érgogénique de la compression à l’effort. Dans cet article, je vous propose de nous intéresser à une autre dimension, celle de la récupération.

En effet, la deuxième application la plus courante des vêtements compressifs n’est pas à l’exercice, mais au repos. Là encore, je n’ai rien inventé ! Les différentes marques qui proposent des textiles avec compression avancent des bénéfices sur la récupération, grâce à cette technologie. En médecine, domaine qui a développé la compression avec les bas de contention, elle est d’ailleurs utilisée à des fins thérapeutiques uniquement.

 

Qu’est-ce qu’un vêtement compressif ?

Les vêtements compressifs sont un type de textile conçu pour épouser étroitement la peau. Ils vont exercer une pression sur la partie du corps qui le porte. Ces vêtements sont fabriqués à partir de matériaux élastiques comme le spandex. Les vêtements compressifs varient en termes de degré de compression et de conception. Certains textiles de compression nécessitent une prescription médicale, tandis que d’autres sont disponibles en vente libre, en pharmacie, ou sur des sites d’équipement sportif. Ils sont fabriqués dans une variété de styles, comme les manchons (p. ex. mollets), les bas intégraux (p. ex. “full legs”), ou encore les chaussettes.

Concernant les degrés de compression, une catégorisation existe dans le champ de la médecine. Elle est divisée en 4 classes en fonction de la pression appliquée, mesurée en millimètre de mercure. Les catégories sont

  • Classe 1 “pression légère”, 10 à 15 mmHg
  • Classe 2 “pression moyenne”, 15 à 20 mmHg.
  • Classe 3 “pression forte”, 20 à 36 mmHg.
  • Classe 4 “pression extrême », (très rare), > 36mmHg

Enfin, concernant le type de compression, elle peut être continue (c.-à-d. même pression tout au long du textile), mais cela est rare. Les vêtements compressifs appliquent le plus souvent une compression qu’on appelle “graduée”. Cela signifie que le textile exerce une pression décroissante entre sa partie couvrant l’extrémité du membre, et celle couvrant sa partie la plus proche du tronc. Par exemple, un compressif de jambe intégrale avec compression graduée appliquera la pression la plus forte au niveau de la cheville, et une pression plus légère en haut de la cuisse.

 

À quoi servent les vêtements de compression ?

Dans cet article du site, je vous parlais de différentes stratégies qui permettent de récupérer efficacement après un trail. Parmi celles-ci, je vous citais quelques études qui se sont intéressées à la compression et la récupération. Ici, je vous propose de rentrer en détail dans ces études. Là encore, beaucoup de travaux sur le sujet ont été menées. Différents domaines sportifs ont été couverts, de l’endurance aux efforts explosifs, en passant par la musculation. Le trail étant un croisement entre 2 types d’effort, à savoir un effort d’endurance et un effort musculaire, avec des dommages musculaires potentiels. Aussi, je vous parlerais ci-dessous uniquement des études menées sur compression et récupération de l’endurance, et dont les résultats s’appliqueront aussi à la course à pied ; et de celles conduites sur compression et récupération de la force.

Plus précisément, je vais vous présenter les résultats des études de 4 études. Parmi celles-ci, il y aura une revue de littérature, 2 méta-analyses, et un essai contrôlé randomisé spécifique au trail. Allons voir ces articles de plus près !

 

Les vêtements compressifs améliorent-ils la récupération ?

La revue de MacRae et al., 2011

Capture d'écran de l'étude de MacCrae et al., 2011

La revue de littérature de MacCrae et al. (2011) est une des premières à s’être intéressée à la relation entre port de vêtements compressifs et récupération. Pour cela, ils ont résumé les résultats de 19 études publiées avant 2011, et menées dans différents contextes sportifs. En explorant ces dernières, ces auteurs avancent tout d’abord que si la littérature a du mal à faire ressortir des effets bénéfiques de la compression sur les performances, les avantages de ces textiles au repos sont plus clairs.

Tout d’abord, et selon ces chercheurs, les vêtements compressifs pourraient réduire l’ampleur de l’inflammation, comme par exemple diminuer la quantité de marqueurs inflammatoires sanguins. Ils aideraient également au nettoyage des protéines circulantes, et des médiateurs de l’inflammation. Cela favoriserait les processus de guérison du muscle. De plus, la compression réduirait les courbatures, ce qui est un effet plutôt psychologique, puisque celles-ci sont mesurées par questionnaire.

Cette équipe souligne cependant que, au moment de la rédaction de leur revue, c’est-à-dire en 2011, la littérature manque de preuve concernant une éventuelle amélioration du retour des performances sportives elles-mêmes. De plus, ce meilleur retour dépendrait du type d’effort préalablement réalisé (p. ex. retour de la performance en sprint ≠ retour de la performance en endurance). Les auteurs concluent que la littérature manque aussi d’études sur les effets chroniques du port des vêtements compressifs à la récupération.

 

La méta-analyse de Hill et al., 2013

Capture d'écran de Hill et al., 2013

En 2013, l’équipe de Hill et al. ont réalisé une méta-analyse pour déterminer si les effets des vêtements de compression sur la récupération, après un exercice induisant des dommages musculaires. Celle-ci a été publiée dans Sports Medicine, un des journaux les plus prestigieux en sciences du sport. Pour cela, ils ont récolté les données de 12 études qui avaient mesuré les courbatures, la force musculaire, la puissance musculaire et un marqueur sanguin d’inflammation (créatine kinase). Elles comparaient toutes, après un exercice engendrant des dommages musculaires (p. ex. contraction excentrique d’un muscle, sauts pliométriques, descente en marchant pendant 30min ), un groupe “port de vêtements compressifs” à un groupe “contrôle” qui n’en portait pas. Pour estimer la qualité de la récupération, les études considérées comparaient les mesures avant l’exercice à celles réalisées à +24h, +48h et +72h.

Les analyses statistiques de toutes ces données cumulées ont montré que les vêtements de compression semblaient particulièrement efficaces pour améliorer la récupération après des dommages musculaires. Précisément, elles ont révélé que le port des vêtements compressifs réduisait significativement les courbatures perçues et les concentrations des marqueurs sanguins d’inflammation. De plus, il améliorait significativement le retour de la force et de la puissance musculaire. La taille de ces différents effets était similaire (entre g = .40 et .48). Je trouve cela intéressant, car sous-entend une homogénéité entre ces effets.

Effet des vêtements compressifs sur les courbatures Effet des vêtements compressifs sur le retour de la force musculaire
Effet des vêtements compressifs sur le retour de la puissance musculaire Effet des vêtements compressifs sur les marqueurs sanguins d'inflammation
Les carrés représentent la taille de l’effet méta-analytique (c.-à-d. toutes études confondues). Les barres autour des carrés représentent l’intervalle de confiance autour de l’effet moyen (c.-à-d. la variabilité). Si ces barres croisent l’axe horizontal du 0, alors l’effet n’est pas significatif. Sinon, l’effet est significatif.

 

La méta-analyse de Brown et al., 2017

Capture d'écran de Brown et al., 2018

La méta-analyse de Brown et al., publiée en 2017 dans Sports Medicine (elle aussi), a adopté une démarche similaire à celle de Hill et al. (2013), en allant plus loin. Cette équipe de chercheurs avait 2 buts. Le premier était d’évaluer si le port de vêtements compressifs pouvait améliorer la récupération. Le deuxième était d’estimer, si tel est le cas, dans quelles conditions ce type de textile est efficace, ou non. En d’autres mots, leur second objectif était d’identifier les conditions optimales d’utilisation de la compression, tant en termes de type d’effort où elle manifesterait ses bénéfices, qu’en termes de durée ou de pression appliquée par exemple.

Pour cela, et après une revue de littérature rigoureuse, les auteurs ont identifié 23 études de bonne qualité. Dans toutes celles-ci, les participants réalisaient tout d’abord un effort fatigant. L’effort pouvait être soit surtout stressant sur le plan musculaire (p. ex. sauts pliométriques), soit surtout stressant sur le plan métabolique (p. ex. meilleure performance sur 40 km à vélo). Après cet effort initial, ces études comparaient un groupe “port de vêtements compressifs” à un groupe “contrôle”. Les marqueurs de la récupération étaient divisés en 3 catégories : retour de la force musculaire, retour de la puissance musculaire, retour de l’endurance musculaire.

Résultats généraux

Le premier résultat de cette méta-analyse est que, toutes études confondues, les personnes des groupes “vêtements compressifs” avaient en moyenne significativement mieux récupéré que celles des groupes “contrôle“. La taille de l’effet était “petite à moyenne”.

Haute pression vs. basse pression

Ensuite, les auteurs ont comparé les études ayant utilisé une pression “basse” (entre 5 et 12mmHg) à celles ayant appliqué une pression “haute” (entre 16 et 18.3 mmHg). Cette analyse n’a pas révélé de différence significative. Cela sous-entend que la pression appliquée n’influence pas les bénéfices observés.

Niveau d’entraînements des participants

Pour mieux comprendre les effets des vêtements compressifs sur la récupération, les auteurs ont comparé leurs effets entre les études conduites sur des participants “entraînés” à celles réalisées sur des participants “peu entraînés”. Ces analyses n’ont révélé aucune différence significative dans les bénéfices de la compression selon le niveau sportif.

Durée de port

Par la suite, ces chercheurs ont voulu analyser si la durée du port des vêtements compressifs influençait l’ampleur des bénéfices. Pour cela, ils ont comparé les études ayant proposé un port entre 0 et 2 heures, à celles avec une durée comprise entre 2 et 8 heures, celles avec un port inférieur à 24h, et enfin à celles avec une durée de plus de 24h. Les statistiques ont révélé que les plus grands bénéfices étaient observés quand la durée était comprise entre 2 et 8 heures. Les effets bénéfiques de la compression sur la récupération étaient moindres pour des durées inférieures, et supérieures à celle-ci.

Type d’effort et de dommages musculaires

Enfin, les auteurs ont voulu évaluer si la compression avait des effets surtout sur certains types de marqueurs de récupération. Aussi, ils ont voulu estimer si l’efficacité de ce type de textile dépendait de l’exercice à l’origine des dommages. Les résultats de ces deux sous-analyses tendent dans la même direction. Tout d’abord, les vêtements compressifs étaient efficaces sur les 3 marqueurs de récupération considérés, mais montraient la plus grande efficacité sur le retour de la force musculaire (suivi par le retour de la puissance musculaire, et enfin par le retour de l’endurance musculaire, dans l’ordre décroissant d’efficacité). Ensuite, ces textiles étaient surtout efficaces après des efforts initiaux induisant des dommages musculaires. Ils n’avaient cependant pas d’effet après un effort majoritairement stressant sur le plan métabolique (p. ex. cyclisme, course à pied à plat).

 

Compression après un trail

Capture d'écran de MARTÍNEZ-NAVARRO et al., 2021

En 2021, Martinez-Navarro et ses collaborateurs ont conduit un essai contrôlé randomisé. Ils cherchaient à estimer si le port de vêtements compressifs pouvait améliorer la récupération de personnes ayant terminé un ultra-trail de 110km, 5600m D+ et 4400m D-. Un essai contrôlé randomisé, c’est super et souvent très robuste ! Cependant, il y a souvent moins de participants que dans une méta-analyse. Vous allez vite comprendre pourquoi je précise cela …

Les auteurs ont recruté 32 participants. Ceux du groupe “compression” portait un vêtement compressif (10 à 15 mmHg, pression basse) pendant 24 heures après la course. Ceux du groupe “contrôle” n’en portait pas. Avant la course, après la course, à +24h et +48h (soit 4 temps de mesures) les chercheurs mesuraient différents marqueurs inflammatoires sanguins, et les courbatures perçues. Les analyses statistiques n’ont révélé que très peu de différence significative. Plus précisément, seulement une mesure des courbatures l’était, en faveur des vêtements compressifs.

Cependant, de manière descriptive (c.-à-d. sans analyse statistique) quelque chose d’important est pour moi à noter. Quel que soit le temps de mesure après la course (c.-à-d. +24h ou +48h) tous les marqueurs sanguins d’inflammation étaient numériquement plus bas dans le groupe “compression », que dans le groupe “contrôle”. De même, les courbatures étaient toujours plus basses dans le groupe ayant porté le vêtement compressif, comparativement à l’autre. Face à ce type de résultats, il y a deux explications. Soit les effets n’existent pas, soit les auteurs n’ont pas assez de participants (seulement 32) pour identifier une différence significative. Au vu des méta-analyses citées plus haut (avec beaucoup plus de participants), je penche pour l’option 2 …

 

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Conclusion – Porter des vêtements compressifs en récupération ?

En conclusion, mon analyse de la littérature est que la plupart des résultats tendent dans la même direction. Les vêtements compressifs semblent avoir des effets positifs sur la récupération après un exercice physique. La revue de littérature de MacRae et al. (2011) soulignait déjà cette tendance. La méta-analyse de Hill et collaborateurs a montré qu’après un exercice qui induisait des dommages musculaires, le port de vêtements compressifs améliorait la récupération objective (p. ex. retour de la force musculaire). L’excellente méta-analyse de Brown et al. (2017) a confirmé cela, en soulignant tout de même des conditions d’applications, et des situations où la compression manque d’efficacité. Précisément, ils ont avancé que les vêtements compressifs étaient surtout efficaces après un effort à dominante “stress musculaire” (p. ex. excentrique, pliométrique) qu’après un effort à dominante “stress métabolique” (p. ex. course à pied). De plus, cette méta-analyse a montré qu’une durée de port idéale se situe entre 2 et 8 heures. Bien que non significatif, les résultats de Martinez-Navarro et al. (2021) tendent aussi dans la même direction.

Je souligne que dans la littérature, 2 autres méta-analyses existent sur le sujet de la compression et de la récupération (Engel et al., 2016 ; Marques-Jimeneze et al., 2016). Je ne les ai pas intégrées dans cet article, car je trouve qu’elles sont moins informatives que celles discutées ici. Cependant, il est intéressant de noter que leurs résultats tendent globalement dans la même direction des les travaux que je vous ai présentés.

 

Mes conseils sur la compression et la récupération

Si vous êtes coureurs sur route, ou sur piste, il est possible que les compressifs manquent d’efficacité après vos séances à pied. Vous serez dans le cas d’un stress à dominante métabolique. Ce n’est pas le domaine où les textiles avec compression ont démontré la plus grande efficacité. Si vous être traileurs ou traileuses c’est différents ! Le trail est à la frontière entre un stress métabolique, et un stress musculaire, surtout à cause des descentes et des contractions excentriques répétées qu’on y réalise. Aussi, au regard des résultats discutés, il me semble que le port de vêtements compressifs pourrait vous aider après des entraînements en trail.

La raison pour laquelle je me permets de régulièrement l’utilisation des vêtements compressifs en récupération en trail, est aussi que leur rapport coût-bénéfices est moindre. En dehors de leur prix d’acquisition, ce n’est pas un objet contraignant. Il suffit de les enfiler, de les porter entre 2 et 8 heures, et les enlever. Facile non ? En tout cas personnellement, je trouve que ça vaut le coup. Enfin, aucune étude n’a montré l’inverse, à savoir une dégradation de la récupération avec l’utilisation de vêtements compressifs (contrairement à l’utilisation du froid, par exemple). Aussi, même si leurs effets sont modestes, les risques sont minimes, pour ne pas dire inexistants.

 

Les compressifs que j’utilise

Personnellement, j’utilise le modèle “Full Legs” de la marque Compressport. Il en existe d’autres sur le marché, mais je suis particulièrement satisfait de ces derniers.

Modèle “Full Legs” de Compressport

 

Vidéo résumé de cet article

Vidéo 1 – Mes explications en vidéo

 

Vidéo 2 – Mon interview d’un expert, Fabrice Vercruyssen

 

Références bibliographiques

• Brown, Freddy, et al. “Compression garments and recovery from exercise: a meta-analysis.” Sports medicine 47 (2017): 2245-2267. (Lien)
• Hill, Jessica, et al. “Compression garments and recovery from exercise-induced muscle damage: a meta-analysis.” British journal of sports medicine 48.18 (2014): 1340-1346. (Lien)
• MacRae, Braid A., James D. Cotter, and Raechel M. Laing. “Compression garments and exercise: garment considerations, physiology and performance.” Sports medicine 41 (2011): 815-843. (Lien)
• Martínez-Navarro, Ignacio, et al. “Effects of wearing a full body compression garment during recovery from an ultra-trail race.” European Journal of Sport Science 21.6 (2021): 811-818. (Lien)

Cyril Forestier

Trailer passionné 🏃🏻‍♂️ et docteur en science du mouvement humain (STAPS) 👨‍🔬 , je décrypte la littérature scientifique pour mieux comprendre notre pratique. Je rédige des articles afin de vulgariser des études, de vous partager mes tests matériels ou encore de vous communiquer ce qui me motive, tout ça dans le but de courir mieux ! Des réponses à vos questions se trouvent surement dans mes articles 😉.

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