Vous voulez savoir comment s’alimenter au quotidien quand on fait du trail ? Cet article est pour vous 😉 !
Bien s’alimenter au quotidien quand on fait du trail
Comme tous les sports, les entraînements en longue et ultra distances demandent beaucoup de ressources. De manière vulgarisée on dit souvent que les progrès sportifs reposent sur trois piliers : l’entraînement, la récupération, et l’alimentation. Autrement dit, nous pouvons suivre le meilleur plan d’entraînement, et avoir les meilleures stratégies de récupération (dont je vous parle ici), nous ne progresserons pas si notre alimentation n’est pas optimale. Vous pouvez avoir le meilleur moteur du monde, et la meilleure assistance lors de vos arrêts aux stands, vous ne préformerez pas sans le bon carburant.
Internet et les librairies regorgent de différentes publications sur le sujet. Malheureusement, ces dernières sont souvent sans la moindre justification robuste, et parfois contradictoires. Dans cette thématique où tout le monde, et parfois n’importe qui, y va de sa plume sur comment remplir notre assiette, je vous propose comme souvent de replacer les preuves scientifiques au coeur des discussions. Par chance, ces dernières années, la science a considérablement exploré la question de l’alimentation quotidienne optimale quand on pratique un sport d’endurance comme le trail ou l’ultra-trail.
Les traileurs et les traileuses mangent mal !
Je trouve particulièrement important d’aborder la question de l’alimentation quotidienne quand on pratique du trail car d’après la littérature, la majorité des coureuses et coureurs s’alimentent mal. En effet plusieurs études se sont intéressés à la qualité des apports nutritionnels habituel, au jour le jour, chez les athlètes, et plus particulièrement chez ceux non-élites, comme vous et moi, qui ne bénéficions pas d’un suivi par un staff.
Par exemple, Masson et Lamarche se sont intéressés à l’alimentation quotidienne de 116 athlètes de triathlon d’hiver, de pentathlon des neiges, et de triathlon d’été. Ils ont comparé les apports nutritionnels de ces personnes, avec les recommandations optimales soulignées dans la littérature (dont nous parlerons juste après). Tout d’abord, ils ont montré que, rapporté au poids corporel, les sportifs et les sportives incluent mangé autant. Cependant, beaucoup d’apports nutritionnels chez ces athlètes étaient en dessous des recommandations. Par exemple, ceux en glucides et en protéines étaient souvent sous-optimaux.
De manière analogue, en 2016 Williamson montrait que 90 % des coureurs de longue et ultra distance considèrent la nutrition comme fondamentale pour leur performance. Parallélement, son étude souligne que la plupart des personnes négligent ou ignorent les recommandations de la littérature scientifique. Blennerhassett et al. faisaient un constat similaire en 2018. Leur étude révélait que les athlètes de longue et ultra distance auraient tendance à préférer les conseils d’autres athlètes à ceux scientifiques formulés par des experts en nutrition.
Toutes ces preuves questionnent sur la qualité des apports nutritionnels des sportives et sportifs de trail et d’ultra-trail.
L’alimentation au jour le jour pour progresser
En 2019, la Société Internationale de Nutrition Sportive (“International Society of Sports Nutrition”) a publié un article spécialement sur l’alimentation en trail et ultra-trail. Cette énorme revue de littérature va nous servir de socle pour deux raisons. Premièrement, elle réunit des informations disponibles et spécifiques au trail et à l’ultra-trail. Elle prend donc en considération les points communs, mais aussi les différences qui existent entre les besoins quand on pratique un sport d’endurance de manière générale, et lorsqu’on pratique du trail spécifiquement. Deuxièmement, cette organisation, et le journal de publication sont consensuels. Cette société savante regroupe les meilleurs chercheurs dans le monde sur la thématique de la nutrition sportive. Le journal où l’article est publié est spécialisé dans le domaine, et de hauts rangs.
De plus, je suis également allé chercher ailleurs dans la littérature. Aussi, tout au long de cet article je compléterais les propos de la Société Internationale de Nutrition Sportive avec d’autres études. Je vous précise qu’ici je n’aborderai pas l’alimentation pendant un entraînement ou une compétition de trail (vous trouverez ces informations sur ce billet du blog). Voyons ensemble comment bien s’alimenter au quotidien quand on fait du trail !
S’alimenter selon la Société Internationale de Nutrition Sportive
D’après cet article, la nutrition est une composante essentielle de l’entraînement, et influence les adaptations physiologiques à celui-ci. Tout d’abord, des apports en glucides cohérents avec la charge d’entraînement optimisent les adaptations physiologiques, c’est-à-dire les progrès, par différents moyens. On parle de voies cellulaires, qui permettent les progrès. À l’inverse, des entraînements réguliers par exemple en état de manque de glycogène augmentent les hormones de stress circulantes (p. ex. cortisol), et provoqueraient des perturbations de ces mécanismes d’adaptation. Avec ce genre d’apports sous-optimaux, on observerait par exemple des problèmes immunitaires (p. ex. sportif plus souvent malade) et des risques de surentraînement.
De plus, une récupération optimale dépend aussi de la satisfaction des besoins quotidiens en protéines des athlètes, puisque ces besoins permettent la croissance et le maintien de la masse musculaire. De même, boire correctement est crucial. Des apports hydriques insuffisants au quotidien peuvent limiter la récupération et diminuer les performances aux entraînements suivants.
L’objectif de cette revue de littérature est de fournir un résumé complet et basé sur des évidences scientifiques, des recommandations nutritionnelles optimales à adopter au quotidien pour des coureurs et coureuses de longue et ultra distance. Ce résumé est à destination des entraîneurs, des médecins, du personnel de soutien et des organisateurs de courses, mais surtout des athlètes eux-mêmes. Dans la suite, je vais vous présenter leurs conseils, en matière de calories, de macronutriments et d’apports en eau. Nous parlerons aussi vaguement de stratégies jouant sur les doses de glucides et des compléments alimentaires.
(Petit détail : cette revue de littérature divise les recommandations en fonction de la qualité des études incluses, notée de A à D. Ici ne seront résumées que celle provenant des meilleurs niveaux d’évidence, à savoir les études de grade A et B).
Apports caloriques hebdomadaires
Les auteurs avancent qu’un des principaux défis nutritionnels que les coureurs et coureuses de longue et ultra distances rencontrent concerne les calories. Il n’est pas si simple d’atteindre des apports cohérents avec les besoins caloriques quotidiens optimisant la récupération, et la bonne réalisation des d’entraînement. Ces besoins sont influencés par différents paramètres comme :
- le métabolisme de base (c.-à-d. ce que votre organisme consomme au repos).
- l’activité quotidienne (c.-à-d. si vous avez un style de vie plutôt actif ou inactif).
- et l’entraînement.
Après un entraînement, les besoins en termes de calories dépendent de la masse corporelle, du niveau de l’athlète, de la distance et de la durée de la séance, de son intensité, et des conditions environnementales. Le tableau ci-dessous présente des estimations générales des besoins caloriques quotidiens des coureurs et coureuses de longue et ultra distances en fonction du sexe, de la durée et de l’allure des sessions hebdomadaires (moyennes sur la semaine), ainsi que d’extrêmes classiques de pourcentage corporel de masse grasse.
Quelques exemples d’estimations de besoins caloriques
Tableau 1. Estimation des besoins caloriques quotidiens d’un ou une athlète de longue et ultra-distance, en fonction du sexe, du % de masse grasse (%BF), et de la durée/de l’allure des séances (moyennées sur la semaine). |
Différentes études ont confirmé ces estimations en montrant que le coût énergétique de la course à pied serait compris entre 47 et 71 kcal/km). Par exemple, une femme de 50 kg avec 15 % de masse grasse, courant en moyenne hebdomadaire 1h par jour à 8,4 km/h en moyenne aurait besoin d’environ 2004 kcal par jour pour maintenir l’équilibre calorique, et d’approximativement 3423 kcal par jour si sa moyenne hebdomadaire passe à 3h par jour à 13,8 km/h. |
Cet article précise que ces estimations sont générales et ne servent que de premier indicateur. Pour des estimations plus précises, vous pouvez préférer l’utilisation de montre connectée et d’une ceinture cardiaque. Ces derniers permettent de suivre plus précisément vos dépenses caloriques quotidiennes et hebdomadaires, à travers votre vie courante et vos entraînements. Vous pouvez vous inspirer de ces estimations pour calibrer vos apports.
Pour des estimations encore plus précises, vous pouvez consulter un médecin nutritionniste. De plus, si les entraînements se déroulent sur terrain difficile, variable et accidenté, et dans des conditions extrêmes de température et/ou d’altitude, les besoins caloriques et ceux en glucides augmenteront considérablement. Enfin, lorsque les apports caloriques ne peuvent être atteints (p. ex., les jours d’entraînement intensif ou après plusieurs séances d’entraînement successif), un apport énergétique supérieur aux calories habituelles serait justifié les jours de repos.
Macronutriments hebdomadaires.
Une fois que nous avons une estimation de nos besoins en termes de calories, nous pouvons nous demander comment répartir les apports couvrant ces besoins entre les différents macronutriments consommables (c.-à-d., glucides, lipides et protéines). D’après la littérature, pour des coureurs et coureuses en longue et ultra distance s’entraînant régulièrement en endurance, les glucides devraient représenter environ 60% des apports énergétiques totaux. Les protéines devraient représenter environ 15 % de ces derniers, et les lipides 25 %. Voyons plus précisément ces recommandations.
Glucides
Pour un coureur ou une coureuse s’entraînant régulièrement, et de manière intensive (p. ex. en moyenne 2-3 heures par jour, 5-6 jours par semaine), les apports optimaux se trouveraient entre 5 et 8 grammes de glucides par kilo de poids de corps et par jour. Par exemple, un coureur de 75 kilos s’entraînant en moyenne 2 heures par jour 5 jours par semaine devrait consommer 5 grammes par kilo de poids de corps * 75 kilos = 375 grammes de glucides par jour. Pour des athlètes s’entraînant de manière encore plus intense, les apports en glucides peuvent augmenter jusqu’à 7 à 10 grammes par kilo de poids de corps et par jour.
Masson et Lamarche avancent un dosage optimal similaire, en moyenne de 6 grammes de glucides par kilos de poids de corps et par jour. Par exemple, pour un individu de 70 kilos, cela reviendrait à 420 grammes de glucides. La revue de littérature de Costa et al. (2018) souligne que depuis les années 2000, un consensus scientifique existe autour d’un apport quotidien optimal en glucides, pour des athlètes d’endurance, entre 3 et 12 grammes par kilo de poids de corps et par jour. Celui-ci permettrait de répondre aux besoins de l’entraînement et progresser. Le dosage est évidemment à moduler en fonction de la charge d’entraînement. Cette dernière équipe souligne aussi que plusieurs travaux menés sur les marathoniens élites kenyans révèlent des apports en glucides dépassant les 10 grammes par kilos de poids de corps et par jour.
Moduler ses apports glucides en fonction de sa charge d’entraînement
En 2019, Vitale et al. rapportent que 4 associations pour l’alimentation des sportifs, à savoir l’Académie de Nutrition et de Diététique, les Diététiciens du Canada, le College Américain de Médecine du Sport, et la Société Internationale de Nutrition Sportive, se sont accordé sur comment adapter ses apports glucidiques en fonction de son volume d’entraînement en endurance.
- Pour les personnes pratiquant avec une moyenne hebdomadaire d’environ 1h d’endurance légère par jour, il faudrait consommer entre 5 et 7 grammes de glucides par kilos de poids de corps et par jour.
- Pour celles réalisant une moyenne hebdomadaire comprise entre 1 à 3h d’endurance par jour, dont des entraînements d’intensité modérée ou élevée, il faudrait consommer entre 6 et 10 grammes de glucides par kilos de poids de corps et par jour.
- Pour les pratiquants d’ultra-endurance, avec une moyenne hebdomadaire comprise entre 4 et 5 heures d’entraînement par jour, dont des intensités modérées ou élevées, il faudrait 8 à 12 grammes de glucides par kilos de poids de corps et par jour.
Des risques à consommer de hautes doses de glucides ?
Il est parfois cru qu’une alimentation riche en glucides puisse être risquée pour la santé. Sur ce point, l’Académie de Nutrition et de Diététique, les Diététiciens du Canada, et le College Américain de Médecine du Sport ont regroupé toutes les preuves scientifiques disponibles pour conclure si oui ou non ce risque était crédible. La conclusion de ces 3 organismes est que ni la quantité de glucides ni l’indice glycémique des repas n’affectent les risques pour la santé, du moment que ces derniers sont cohérents avec les dépenses, et les besoins des sportifs. En d’autres termes, consommer des repas riches en glucides ne semble, d’après ces organismes, spécialement risqué, tant que vos entraînements justifient ces apports.
Envie de progresser en trail et en course à pied ? Découvrez ici mes offres de coaching sur mesure 100% individualisées ! |
Protéines
Combien de protéines par jour quand on fait du trail ?
Vitale et Getzin (2019) soulignent que les athlètes d’endurance, comme les traileuses et traileurs, ont souvent dénigré l’importance des protéines. D’après ces auteurs, ainsi que Costa et al. (2018) ; Masson et Lamarche (2016), et Tiller et al. (2019), de manière générale il est recommandé aux athlètes d’endurance de consommer entre 1,5 et 1,8 gramme de protéines par kilo de poids de corps et par jour. Cependant, le trail et l’ultra-trail peuvent, selon les terrains de pratiques, engendrer des sollicitations musculaires demandant des apports plus importants.
Selon l’article de la Société Internationale de Nutrition Sportive (Tiller et al., 2019), pour un traileur ou une traileuse avec des charges d’entraînement moyennes, les apports minimums en protéines pour un athlète pratiquant du trail seraient de 1,6 gramme par kilo de poids de corps et par jour. Par exemple, un coureur de 75 kilos s’entraînant régulièrement devrait consommer 120 grammes de protéines par jour. Cependant, les athlètes avec des besoins plus importants, avec des charges d’entraînements élevées, et des contraintes musculaires prononcées (p. ex. charge excentrique considérable par un cycle ou une séance de travail en descente, cycle de musculation, période avec beaucoup de dénivelé) peuvent augmenter ces apports.
Ils et elles pourraient aller jusqu’à un maximum de 2,5 grammes par kilo de poids de corps et par jour. Par exemple, un coureur de 75 kilos dans une phase de préparation d’un ultra-trail avec de la musculation et des séances longues avec beaucoup de dénivelé, pourrait aller jusqu’à un maximum de 187 grammes de protéines par jour. Costa et al. (2018) avancent que plusieurs études ont montré que des cyclistes élites du Tour de France, et des marathoniens élites kenyans consommaient entre 2 et 2.5 grammes de protéines par kilos de poids de corps et par jour.
Quand consommer ces protéines ?
Nous aurons l’occasion d’en reparler dans un autre article, mais le mythe de la fenêtre métabolique, qui nous incite à consommer des protéines dans les 30 minutes qui suivent une activité sportive, est loin d’être robuste scientifiquement. De plus, différentes études ont montré que les protéines devaient être consommées régulièrement. Une seule prise aiguë n’est pas efficace, mais des doses réparties sur la journée le sont (p. ex. Pearson et al., 2022 ; Xia et al., 2018).
Concernant le timing d’ingestion, l’article de Société Internationale de Nutrition Sportive avance que consommer des protéines toutes les 3h minimum, sans dépasser les 20 grammes par prise, serait optimal. Vitale et Getzin avancent aussi que 0,3 gramme de protéines par kilo de poids de corps toutes les 3 heures minimum est optimal. Pour un individu de 70 kilos, cela revient à des prises de 21 grammes, espacées de 3 heures minimum. De plus, consommer des protéines peu de temps avant l’endormissement serait une autre stratégie efficace pour favoriser la synthèse des protéines musculaires nocturne. Les athlètes ayant du mal à couvrir leurs besoins en protéines par le biais de l’alimentation peuvent choisir de se supplémenter (p. ex. protéines végétales en poudre).
Lipides
Les différentes études que j’ai mentionnées jusqu’ici soulignent que les lipides sont parfois relayés au second plan, à tort. Les lipides disponibles représentent, avec les glucides, une source de production d’énergie considérable à l’effort. Je vous détaille cela dans cet article. S’il est vrai que pour les sportifs d’endurance, une alimentation riche en glucides et en protéines est associée à une amélioration des performances, les lipides ne sont pas pour autant à négliger (Vitale et Getzin, 2019). De manière assez imprécise, ces deux auteurs avancent que les apports en lipides doivent venir compléter les optimums en glucides et protéines, pour atteindre ensemble (c.-à-d. glucides + protéines + lipides) les calories journalières ciblées.
L’article de la Société Internationale de Nutrition Sportive est plus précis. Tiller et al., avancent que pour un coureur ou une coureuse avec des charges d’entraînement élevées, des apports en lipides entre 1,0 et 1,5 gramme par kilos de poids de corps et par jour semblent optimaux. Par exemple, un coureur de 75 kilos s’entraînant régulièrement devrait consommer 1,2 * 75 = 90 grammes de lipides par jour. Pour un athlète avec des charges d’entraînement élevées, les valeurs recommandées augmenteraient jusqu’à un maximum de 2 grammes par kilo de poids de corps et par jour. Par exemple, un coureur de 75 kilos s’entraînant très intensément devrait consommer 2 * 75 = 150 grammes de lipides par jour.
Manipuler la disponibilité des glucides
Dans tous les articles cités, les auteurs parlent de la manipulation de la disponibilité des glucides. Sous ce terme un peu barbare se cachent en fait des pratiques que l’on connaît tous, et qui visent à se priver, pendant plus ou moins longtemps, de glucides. On parle de privation de glucides périodisée pour des restrictions de glucides pendant quelques heures (p. ex. footing à jeun). On parle de privation de glucides chroniques pour des restrictions sur du long terme (p. ex. le régime cétogène). Ces sujets étant vastes et demandant des revues de littérature à part entière, je ne les traiterais pas ici. Cet article du site parle du régime cétogène et ses effets sur l’endurance. Celui-ci parle des privations périodisées. Je vous présente ici un résumé rapide de ces pratiques, et vous invite à consulter les contenus dédiés pour plus d’information.
Concernant le régime cétogène, toute la littérature s’accorde sur son inefficacité, voire sa dangerosité. La très grande majorité des travaux démontrent une dégradation des performances à toutes les intensités de pratique. D’autres tendent vers des risques pour la santé, sportive et générale, à moyen et long terme. Concernant la privation périodisée, comme les entraînements à jeun ou les protocoles type “train-low”, certains bénéfices mineurs seraient observables à très haut niveau. Il existerait aussi une augmentation des risques de blessures, de RED-S et d’immunodépression. Néanmoins, ces pratiques seraient bien moins risquées que la privation chronique, à savoir le régime cétogène.
Ingestion de glucides juste avant l’entraînement.
Certains messages avancent l’importance de consommer des glucides en bonne quantité juste avant un effort. C’est par exemple le rôle que veulent jouer les boissons d’attentes à consommer dans l’heure précédent un entraînement ou une compétition. Cependant, des études semblent montrer que la consommation de glucides avant l’effort (p. ex. dans les 90 minutes précédant le début d’une séance) pourrait avoir des conséquences délétères à la performance. Cela serait d’autant plus vrai en cas de boisson à indice glycémique élevé, et d’efforts longs.
En effet, ces boissons diminueraient l’efficacité de la lipolyse (c. à d., utilisation des graisses comme carburant), et augmenteraient les probabilités de subir une hypoglycémie pendant les premières heures de l’exercice. Les données disponibles suggèrent que consommer des glucides rapides avant un entraînement de courte durée (p. ex. 1h – 1h30 max) serait pertinent. Cependant, avec un entraînement ou une épreuve de longue ou d’ultra-distance, cela ne serait pas utile. Les athlètes devraient alors faire leur maximum pour se trouver en euglycémie avant celles-ci (c.-à-d. avec un taux de glucose dans le sang “normal” ou “moyen”).
Apports hydriques
Après un entraînement
Après un exercice, il est essentiel de se réhydrater afin de compenser les pertes hydriques dues à l’effort. Ces pertes peuvent être calculées approximativement en calculant la différence entre la masse corporelle avant l’exercice et celle après l’exercice. Cependant, pour rétablir complètement l’équilibre hydrique, la littérature a montré qu’il fallait consommer légèrement plus de liquide que celui perdu. Les études mentionnées dans cette revue suggèrent que consommer 150% de ce dernier, plutôt que 100%, serait préférable pour rétablir cet équilibre, mais que des volumes plus élevés (p. ex. 200%) n’avaient pas de bénéfices supplémentaires.
De plus, il semblerait que les meilleurs techniques de réhydratation post-exercice soit celles qui ajoutent du sodium au liquide, à des teneurs approchant la concentration de sodium dans la sueur. La teneur en sodium des boissons commerciales pour sportifs (460-575 mg par litre), ou d’eau avec des minéraux comme la Rozana pourrait suffire.
Au quotidien
Étant donné la sensibilité et la fiabilité de la sensation de soif chez l’homme pour indiquer une déshydratation, et les grandes différences qui existent dans la rétention d’eau, et dans son absorption par d’autres voies (p. ex. alimentation) les auteurs de cet article trouvent raisonnable de recommander de boire à sa soif au quotidien. De plus, les affirmations selon lesquelles il faudrait se surhydrater pour “rincer les reins” ou “éliminer les toxines du sang” n’étant à ce jour pas supportées par des évidences scientifiques, et une surhydratation, entraînant une diminution des concentrations d’électrolytes, ou un risque d’hyponatrémie ou d’insuffisance du système rénal dans le pire des cas, ces stratégies seraient à éviter.
Les compléments alimentaires
Parmi les travaux que j’ai cités jusqu’ici, Tiller et al. (2019) et Vitale et Getzin (2019) abordent brièvement la question des compléments alimentaires. Cependant, ils soulignent tous que les études sur le sujet sont peu nombreuses. Tiller et al. (2019) soulignent qu’à ce jour, presque aucune étude ne suggère que se supplémenter en vitamines ou minéraux est nécessaire ni efficace, pour améliorer sa récupération ou ses performances.
Vitale et Getzin (2019) avancent qu’une alimentation riche en légumes contenant des nitrates pourrait être intéressante. Il s’agit par exemple des épinards, des betteraves ou de la laitue. Concernant les antioxydants, que l’on retrouve par exemple dans le thé vert, les baies ou encore les légumes verts foncés, ces mêmes auteurs concluent que leurs bénéfices ne sont pas évidents. Les athlètes pourraient vouloir les éviter avant et après les entraînements pour maximiser les processus adaptatifs. Ils pourraient également vouloir en consommer plus que d’habitude les jours précédents une épreuve sportive. Cependant, ces derniers pourraient ne pas avoir d’effets notables.
Enfin, la consommation épisodique de probiotiques, et surtout de Lactobacillus and Bifidobacteria, pourrait contribuer à réduire les troubles gastro-intestinaux pendant les entraînements et les compétitions. Elle pourrait également réduire les risques infections des voies respiratoires supérieures (p. ex. angine, sinusite).
Cet article vous plait ? Soutenez Courir Mieux, et rejoignez sa communauté de passionnés de trail, et de course à pied sur Patreon ! Ces abonnements donnent aussi accès à de nombreux contenus exclusifs ! |
Conclusion – S’alimenter au quotidien quand on fait du trail
Calories et macronutriments
En conclusion, les différentes études citées avancent que les athlètes s’entraînant pour des distances longues ou ultra ont souvent une charge d’entraînement élevée. Les besoins nutritionnels engendrés par cette charge doivent être comblés à travers une alimentation adaptée. Cependant, la majorité des athlètes de trail et d’ultra-trail ne s’alimenteraient pas de manière optimale. D’après les articles cités, les besoins caloriques quotidiens peuvent aller de 2000 kcal à 5400 kcl en fonction du sexe, de la charge d’entraînement, du poids, et du pourcentage de masse grasse, etc.
Les auteurs proposent qu’au quotidien et pour ces mêmes athlètes, il serait optimal de consommer 6 à 10 grammes de glucides par kilo et par jour ; 1,6 à 2,5 grammes de protéines par kilo et par jour (en fonction de l’intensité du travail musculaire du cycle, et à raison de 20 grammes maximum par prise, en espaçant ces prises de 3h minimum) ; et 1,0 à 1,5 gramme de lipides par kilo et par jour.
Autres apports et stratégies
Les stratégies de privation totale de glucides (p. ex. régime cétogène) seraient à éviter. Celles d’entraînement sur des réserves de glycogène basses à utiliser avec prudence et parcimonie. La consommation de hautes doses de glucides préentraînement ne semble pas optimale. Un niveau “normal” de glycémie avant une séance serait la plupart du temps suffisant.
Après un entraînement, consommer 150% du volume d’eau perdu durant la séance serait optimal. Une boisson contenant entre 460 et 575 mg de sodium par litre semble encore plus efficace pour retrouver un équilibre hydrique. Pour comparaison, cela correspond à une bouteille d’un litre de Rozana. Au quotidien, boire à sa soif serait le plus adapté, en évitant toutes stratégies de surhydratation, inefficaces voire risquées
Enfin, la consommation de compléments alimentaires ne semble pas avoir démontré de réels bénéfices dans la littérature. Les aliments riches en nitrates et en antioxydants pourraient avoir quelques effets intéressants. La prise de probiotiques pourrait aider à réduire les troubles gastro-intestinaux à l’effort et les infections des voies respiratoires supérieures.
Tableau résumé
Le tableau ci-dessous résume les recommandations de Tiller et al., 2019. Vous y trouverez leurs conseils en termes de calories et de macronutriments pour des pratiquants de trail, en fonction de différents paramètres.
Tableau 2. Résumé des recommandations en macronutriments pour un ou une athlète de longue et ultra-distance, en fonction du sexe, du % de masse grasse (%BF), et de la durée/de l’allure des séances (moyennés sur la semaine). |
Toutes les valeurs présentées sont basées sur une vitesse d’entraînement moyenne sur toutes les séances hebdomadaires de 8,4 km/h. Des vitesses moyennes hebdomadaires plus élevées requerront des apports plus élevés. Par exemple, une femme de 50 kg avec 15 % de masse grasse courant en moyenne hebdomadaire 1h par jour, aurait quotidiennement besoin d’environ 301 grammes de glucides, 75 grammes de protéines et 56 grammes de lipides par jour. |
Surprise
À ce lien, vous trouverez un classeur Google Sheet qui donne les grammes de macronutriments en fonction de votre poids. Ce calcul est divisé en trois valeurs cibles, à savoir la borne basse, moyenne, et haute de chaque recommandation avancée dans cette revue de la littérature. Vous pouvez télécharger ce classeur et le modifier / l’utiliser comme vous le souhaitez 🙂
Important : Ce billet est à but informatif. Toutes les valeurs et conclusions avancées dans ce billet proviennent des articles cités, sans aucune réinterprétation. Ce billet traduit et vulgarise les propos avancés par les auteurs mentionnés, sans en entendre le contenu. Pour des informations plus poussées et des conseils individualisés, il est recommandé de consulter un médecin nutritionniste. En cas de doute ou de problème de santé, consultez un spécialiste.
Vidéos associées à cet article
Vidéo 1 – Mes explications en vidéo
Vidéo 2 – Mon interview d’un expert, Julien Louis
Références bibliographiques.
• Blennerhassett, C., McNaughton, L. R., Cronin, L., & Sparks, S. A. (2019). Development and implementation of a nutrition knowledge questionnaire for ultraendurance athletes. International journal of sport nutrition and exercise metabolism, 29(1), 39-45. Lien.
• Costa, R. J., Hoffman, M. D., & Stellingwerff, T. (2019). Considerations for ultra-endurance activities: part 1-nutrition. Research in sports medicine, 27(2), 166-181. (Lien).
• Masson, G., & Lamarche, B. (2016). Many non-elite multisport endurance athletes do not meet sports nutrition recommendations for carbohydrates. Applied physiology, nutrition, and metabolism, 41(7), 728-734. (Lien)
• Pearson, A. G., Hind, K., & Macnaughton, L. S. (2023). The impact of dietary protein supplementation on recovery from resistance exercise-induced muscle damage: A systematic review with meta-analysis. European Journal of Clinical Nutrition, 77(8), 767-783. (Lien)
• Tiller, N. B., Roberts, J. D., Beasley, L., Chapman, S., Pinto, J. M., Smith, L., … & Bannock, L. (2019). International Society of Sports Nutrition Position Stand: nutritional considerations for single-stage ultra-marathon training and racing. Journal of the International Society of Sports Nutrition, 16(1), 50. Lien.
• Vitale, K., & Getzin, A. (2019). Nutrition and supplement update for the endurance athlete: Review and recommendations. Nutrients, 11(6), 1289.
• Williamson, E. (2016). Nutritional implications for ultra-endurance walking and running events. Extreme physiology & medicine, 5(1), 13.
• Xia, Z., Cholewa, J. M., Dardevet, D., Huang, T., Zhao, Y., Shang, H., … & Zanchi, N. E. (2018). Effects of oat protein supplementation on skeletal muscle damage, inflammation and performance recovery following downhill running in untrained collegiate men. Food & function, 9(9), 4720-4729. (Lien)